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Since 2016, Weill Cornell Medicine (New York) and the Gustave Roussy Cancer Campus (Paris) have joined forces to organize an annual conference that provides a forum for education, discussion, and networking among investigators interested in developing safe and effective RT-IT combinations (ImmunoRad).

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Radio-immunothérapie alpha


Principes et intérêts en immunité antitumorale
Alpha-Radioimmunotherapy: principle and relevance in anti-tumor immunity

Jérémie Ménager1,2,3,*, Jean-Baptiste Gorin1,2,3,*, Nolwenn Fichou1,2,3, Sébastien Gouard1,2,3, Alfred Morgenstern6, Frank Bruchertseifer6, François Davodeau1,2,3, Françoise Kraeber-Bodéré1,2,3,4,5, Michel Chérel1,2,3,4, Joëlle Gaschet1,2,3,** et Yannick Guilloux1,2,3,**,#

1 Centre de Recherche en Cancérologie Nantes/Angers (CRCNA) - UMR 892 Inserm, 8, quai Moncousu, BP 70721, 44007 Nantes Cedex 1, France
2 6299 CNRS, Nantes, France
3 Université de Nantes, Nantes, France
4 Institut de Cancérologie de l’Ouest, Saint-Herblain, France
5 CHU Nantes, département de médecine nucléaire, Nantes, France
6 European Commission, Joint research centre, Institute for transuranium elements, Karlsruhe, Allemagne


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Résumé

La radioimmunothérapie alpha (RITα) est une thérapie anticancéreuse vectorisée utilisant généralement un anticorps monoclonal spécifique d’un antigène tumoral couplé à un émetteur de particules α. Les émetteurs α représentent un outil idéal pour éradiquer les tumeurs disséminées ou les métastases. De récentes données démontrent que les rayonnements ionisants, en plus de leur cytotoxicité directe, peuvent aussi induire une immunité antitumorale efficace. Les effets biologiques de l’irradiation pourraient donc être utilisés pour potentialiser la réponse à différents types d’immunothérapie, et ainsi ouvrir la voie

Abstract

Alpha-radioimmunotherapy (α-RIT) is a targeted anti-tumor therapy using usually a monoclonal antibody specific for a tumor antigen that is coupled to an α-particle emitter. α-emitters represent an ideal tool to eradicate disseminated tumors or metastases. Recent data demonstrate that ionizing radiation in addition to its direct cytotoxic ability can also induce an efficient anti-tumor immunity. This suggests that biologic effects on irradiated tissues could be used to potentiate immunotherapy efficacy and opens the way for development of new therapies combining α-RIT and different types of immunotherapy.

*Ces auteurs ont contribué de façon égale à ce travail.
**Ces auteurs ont dirigé ce travail.
© 2016 médecine/sciences – Inserm

La radioimmunothérapie

La radioimmunothérapie (RIT) est une radiothérapie vectorisée visant à placer une source radioactive directement au contact des cellules tumorales. Cette forme de thérapie offre la possibilité de traiter des maladies disséminées, des tumeurs localisées et/ou diffuses tout en minimisant l’exposition des tissus sains aux rayonnements ionisants avec une toxicité limitée. Le concept de radiomarquage d’un vecteur dirigé contre les cellules tumorales n’est pas nouveau. Il a en effet été décrit dès le début des années 1950 [1]. La RIT utilise ainsi un vecteur immunologique, comme un anticorps monoclonal (AcM), spécifique d’un antigène présent sur la tumeur ciblée, qui est couplé à un radionucléide (ou radioisotope) (Figure 1 , partie supérieure), permettant d’obtenir un radioimmunoconjugué stable. Injecté au patient, ce composé radiopharmaceutique se fixe spécifiquement aux cellules tumorales pour les irradier. Cela permet ainsi de cibler potentiellement l’ensemble des sites tumoraux présents dans l’organisme (Figure 1 , partie inférieure).

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Les effets de la RIT dépendent des propriétés physiques, des caractéristiques chimiques et du comportement biologique, non seulement du vecteur mais aussi, du radionucléide. Le choix du radionucléide repose sur des considérations pratiques (le coût, la disponibilité, le type de techniques de radiomarquage et la facilité d’utilisation), le type d’émission du radioélément, le transfert d’énergie linéique (TEL: quantité d’énergie transférée au milieu par la particule incidente, par unité de longueur de la trajectoire en keV1/μm) et la demi-vie physique du radioisotope (durée nécessaire pour que la moitié des noyaux radioactifs d’une source se soient désintégrés) [2]. Cette dernière doit être, autant que possible, en adéquation avec la pharmacocinétique du vecteur utilisé, afin de délivrer la plus grande dose possible de radioactivité à la tumeur après l’injection. Une demi-vie trop courte entraînera un nombre élevé de désintégrations avant d’atteindre la cible. À l’inverse, une demi-vie trop longue engendrera un grand nombre de désintégrations du radionucléide pendant la phase d’élimination du vecteur, rendant le radioimmunoconjugué plus toxique. La demi-vie doit également être compatible avec les applications cliniques et la prise en charge du patient. Ainsi, le temps nécessaire au transfert du radionucléide du site de production jusqu’à l’hôpital, le radiomarquage du vecteur, mais aussi les questions relatives à la radioprotection et la gestion des déchets, sont des paramètres devant être pris en compte.

En radioimmunothérapie, trois types de sources radioactives sont utilisés.

  • Les émetteurs de particules bêta (β-)
  • Les particules β- sont des électrons chargés négativement dotés d’une énergie de 30 keV à 2,3 MeV. Ils ont la capacité de réaliser un long parcours dans les tissus (50 μm à 12 mm). La RIT utilisant des émetteurs β- a montré son efficacité en cancérologie, au niveau préclinique et en clinique. Elle a surtout montré son efficacité en hématologie, dans le traitement des lymphomes non hodgkiniens où elle est devenue un traitement de référence en complément de la chimiothérapie [38]. À ce jour, les deux seules applications de la radioimmunothérapie homologuées par la FDA (food and drug administration, « agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux ») utilisent des émetteurs β-. Il s’agit d’anticorps monoclonaux anti-CD20, un antigène exprimé à la surface des lymphocytes B, couplés soit à l’yttrium-90 (90Y-Ibritumomab tiuxetan, Zevalin®) soit à l’iode-131 (131I-tositumomab, Bexxar®). Ils sont utilisés dans le traitement des lymphomes non hodgkiniens. De nombreux autres essais cliniques ont déjà eu lieu et sont encore en cours pour tester l’efficacité de la RITβ dans le traitement de cancers hématologiques [911] et de cancers métastatiques [1214].
  • Les émetteurs de particules alpha (α)
  • Les particules α sont chargées positivement. Elles possèdent une masse et une charge égale à un noyau d’hélium (c’est-à-dire 2 protons + 2 neutrons). L’énergie des particules α émises par désintégration radioactive est comprise entre 5 et 9 MeV pour un trajet en ligne droite dans les tissus de l’ordre de 50 à 100 μm, ce qui correspond au diamètre de plusieurs cellules [15]. À ce jour, seul un émetteur de particule alpha, le chlorure de radium-223 (Xofigo®, anciennement appelé Alpharadin®) a reçu une autorisation de mise sur le marché dans le traitement du cancer de la prostate résistant à la castration, avec métastases osseuses symptomatiques et sans métastases viscérales connues [16]. Comme nous le verrons par la suite, la RITα a cependant montré son efficacité au niveau préclinique dans des modèles immunocompétents mais son utilisation a également été testée au niveau clinique.
  • Les émetteurs d’électron AugerCette revue sera consacrée uniquement à la RITα ainsi qu’aux différentes caractéristiques de cette modalité thérapeutique.
  • Ces particules ont une énergie faible (de quelques eV à 1 keV) et une portée limitée dans les tissus (de quelques fractions de nm jusqu’à 0,5 μm). L’énergie déposée par les électrons Auger est très localisée. Elle est délivrée dans une sphère de quelques nanomètres de diamètre autour du site de décroissance. Le ciblage final de l’émetteur doit, par conséquent, se réaliser dans un compartiment sensible de la cellule (comme le noyau dont la taille varie de 10 à 20 μm) car les électrons Auger sont hautement cytotoxiques lorsqu’ils se situent à proximité des molécules d’ADN. La RIT Auger reste à un stade de développement préclinique, essentiellement dans des modèles de xénogreffes chez des souris nude (dépourvues de système immunitaire) [17].

La radioimmunothérapie alpha (RITα)

Radiobiologie des particules α

Le court trajet dans la matière des particules α nécessite que les radionucléides qui les émettent soient délivrés dans une zone située à proximité des cellules cancéreuses afin que l’irradiation puisse être efficace. De par leur forte densité d’ionisation, les particules α sont susceptibles de provoquer de multiples lésions très proches les unes des autres sur l’ADN les rendant difficilement réparables (Figure 2). La réparation cellulaire suite aux dommages causés par les particules α est en effet beaucoup moins efficace que pour d’autres formes de rayonnement, en raison de leur forte propension à induire des cassures double brin de l’ADN au sein d’agrégats complexes de différentes lésions au niveau de l’ADN, qui sont difficilement réparables par la cellule.

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Une à trois particules α, traversant le noyau de la cellule cancéreuse, suffisent à la tuer. En comparaison, 1 000 à 5 000 particules β- sont nécessaires pour parvenir à un effet semblable [19]. L’effet cytotoxique des particules α est peu sensible à l’hypoxie, au débit de dose de l’irradiation (c’est-à-dire à l’énergie absorbée par la matière par unité de masse et de temps) et à la prolifération des cellules cibles [15].

Les rayonnements α étant des particules chargées, le dépôt d’énergie, le long de leur parcours linéaire, présente un pic de Bragg2: la majeure partie de leur énergie est en effet délivrée à la fin de leur parcours au sein du tissu.

Étant donné que le trajet des particules α représente le plus souvent de trois à cinq fois le diamètre d’une cellule cancéreuse, leur effet est particulièrement adapté pour le traitement de petits agrégats de cellules néoplasiques. Les effets directs de l’irradiation α restent donc entièrement limités à la tumeur, préservant ainsi le tissu sain environnant [20].

L’ensemble de ces caractéristiques fait de la RITα une modalité thérapeutique prometteuse pour le traitement des cancers disséminés et les maladies résiduelles par rapport aux grosses tumeurs (bulk) qui sont de taille plus importante.

Les radionucléides utilisés en RITα

Plus de 100 radioisotopes émetteurs de particules α ont été identifiés. Ce sont tous des éléments « lourds » ayant un numéro atomique supérieur à 82. Cependant, seule une petite partie d’entre eux est considérée comme étant utilisable comme agents thérapeutiques (Tableau I). Cela est, en grande partie, dû à la faible disponibilité commerciale de ces sources d’émetteurs de particules α [21], à leur demi-vie (qui ne doit être ni trop longue, ni trop courte) ou encore à la nécessité de la mise en place d’un processus chimique permettant leur couplage au vecteur immunologique. Les radionucléides émetteurs de particules α sont soit produits par un générateur, comme le bismuth-213, l’actinium-225, le radium-223, le plomb-212 et le thorium-227, soit produits en cyclotron, comme l’astate-211. La production de ces radionucléides à partir d’un générateur est un processus complexe. Elle nécessite en effet un réacteur nucléaire car ces radioisotopes sont directement ou indirectement des produits de fission de l’uranium. La production par un générateur requiert, en premier lieu, la purification en plusieurs étapes du radioisotope père issu de la fission de l’uranium afin de pouvoir obtenir, après décroissance radioactive, le radionucléide fils d’intérêt. Ainsi, l’obtention de l’actinium-225 est réalisée grâce au générateur thorium-229/actinium-225 obtenu à la suite de l’extraction du thorium-229 [22].

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